Aventure #4 : Les Dessous d'Aliénor

Les Dessous d'Aliénor

I was a little girl alone in my little world...

C'était les premiers jours de mai et à l'orée des bois, le muguet était en fleur. Tôt le matin, Aliénor échappait à la vigilance de sa nourrice et allait s'amuser dans la forêt qui jouxtait le manoir des Maurpassant. Là-bas, à l'ombre des arbres, parmi le feuillage vert émeraude et le pépiement des oiseaux, la fillette imaginait qu'elle régnait sur tout un empire. En cette année-là, elle ne comptait que huit ans, mais son tempérament ambitieux et déterminé était déjà bien aiguisé. Elle savait qu'elle était promise à de grandes choses, le monde obscur des adultes n'avait pas encore jeté son voile noir sur elle. Elle ne se doutait pas que, fille cadette d'une famille de quatre garçons, elle n'avait aucun autre mérite que d'avoir une dot conséquente et qu'elle finirait par être mariée à l'homme le plus offrant, le moment venu. Pour elle, la vie se résumait à une farandole d'amusements en compagnie des papillons et des lucioles. Elle s'était à peine aperçue qu'on lui faisait porter des robes longues depuis quelques temps, comme les grandes dames. Tout ce qu'elle avait constaté, c'est que la jupe se coinçait sans arrêt dans les branches des arbres, lorsqu'elle montait sur l'un d'entre eux, et qu'il était beaucoup plus difficile de courir avec l'ourlet de la robe qui caressait le sol.

Elle était à demi assoupie sur la branche d'un arbre, imaginant qu'elle volait parmi les oiseaux qu'elle apercevait au travers du feuillage, lorsqu'elle entendit des craquements, en contrebas. Se redressant en hâte, elle s'immobilisa, l'oreille aux aguets. Jetant un regard vers le tronc de l'arbre, elle n'eut que le temps de voir l'un de ses frères aînés refermer sa main sur sa cheville et la tirer vers le bas sans ménagement. L'enfant poussa un cri apeuré, bien que la chute ne dura qu'une fraction de seconde, et laissa échapper un gémissement lorsqu'elle heurta le sol. Heureusement, la mousse et les feuilles la firent atterir plus en douceur que prévu, et elle se releva sans mal. Elle aperçut alors ses deux autres frères adolescents pousser des rires goguenards, chacun tapant l'extrémité d'un bout de bois dans leur main. Ce bruit était insupportable, comme s'il égrenait les minutes qu'il lui restait avant que...

N'attendant pas que son troisième frère descende de l'arbre, Aliénor attrapa ses jupes et se mit à courir du plus vite qu'elle le put. Pour eux, ce n'était qu'un jeu. Ils la traquaient, la poursuivaient, et quand enfin elle était à leur merci... Aliénor ferma les yeux pour chasser cette pensée et accéléra l'allure, les poumons en feu. Elle ne voulait pas qu'ils l'atteignent, elle ne voulait pas qu'ils la frappent encore. Elle les entendait la poursuivre. Ils possédaient de plus grandes jambes, elle n'avait aucune chance. Aucune... Ils savaient très bien que nul ne l'entendrait crier dans la forêt.

Au bout d'une clairière, elle bifurqua à droite, cherchant à retourner vers le manoir, mais l'un de ses frères l'atteignit alors, la poussant violemment en avant. La fillette tomba comme une vulgaire poupée de chiffon, mais quand elle se tourna pour regarder son frère, ses yeux bleus lançaient des éclairs.

Les deux autres garçons venaient de rejoindre le premier, toujours aussi menaçants avec leur bâton de bois. Se découpant comme une ombre, cherchant visiblement à se cacher, un autre garçonnet, le plus chétif d'entre eux, apparut dans le champ de vision d'Aliénor. La fillette, reprenant courage, s'écria alors :

"Siméon ! Siméon, viens m'aider !"

Les rires moqueurs des trois autres redoublèrent, comme un rugissement de fauve. La fillette se mit à trembler, dos contre le sol de terre, ses longs cheveux noirs piqués de feuilles et de brindilles tandis qu'elle serrait des poings. Le petit garçon s'avança mais n'entra pas dans le cercle formé par les trois autres. Penaud, il observa sa soeur sans mot dire. Les yeux de celle-ci se remplirent de larmes alors que sa lèvre inférieure se mettait à frémir.

"Mes frères, offrez donc un regard à cette petite sauvageonne !" dit l'aîné, celui qui l'avait fait tomber de l'arbre.

"Elle ne se tient pas à la hauteur de son rang." dit le deuxième frère d'un ton entendu.

"Il faut lui donner une leçon dont elle se souviendra." renchérit le troisième, une lueur de folie nimbant ses yeux.

"Non..." balbutia Aliénor, cherchant à s'éloigner le plus possible d'eux. "Non, pitié... je suis votre soeur..."

"Justement petite soeur" dit l'aîné en s'approchant si près d'elle qu'elle pouvait voir le blanc de ses yeux. "C'est pour ton bien que l'on fait ça."

Il y eut un autre rire et le bâton s'abattit.

¤ ¤ ¤

"Non... pitié... non..."

Les sanglots d'Aliénor obstruait sa gorge. Elle gémissait ainsi depuis des heures, revivant sans cesse le moment de son enfance où elle avait compris qu'elle était parfaitement insignifiante et qu'elle serait toujours dominée par les hommes.

Recroquevillée sur elle-même, dans un cachot aussi glacial que sinistre, elle parvint à peine à se rendre compte que tout ce qu'elle avait vécu appartenait au passé. Le voile qui piégeait sa mémoire sembla se lever et elle vit alors clairement qu'elle était entourée de pierres grises, mais la pièce n'était plus circulaire. Elle ne se trouvait plus dans un puits. On l'avait déplacée pendant le temps qu'avait duré sa démence.

Incapable de bouger un seul membre, elle resta prostrée contre la pierre froide, écoutant le vent mugir au dehors. Elle eut tout juste la force de porter une main à son visage et de sentir ses propres larmes rouler contre ses joues. Elle ne pleurait jamais. Elle ne pensait pas la chose possible.

Clignant des yeux pour en chasser l'eau salée qui s'en écoulait avec lenteur, elle aperçut alors une ombre se pencher au-dessus d'elle, mais ne parvint pas à discerner de qui il s'agissait.

"Siméon..." murmura-t-elle, un faible sourire fendant son visage ravagée par les larmes.

La voix doucereuse de ses cauchemars susurra alors, perfide :

"Non, ce n'est pas lui. Mais ne t'en fais pas, tu le rejoindras bientôt. J'y veillerai."

C'était peut-être pas une si mauvaise idée d'avoir suivie Richard. Bien que la raison de leur voyage était professionnel, du moins pour lui, Capucine allait pouvoir en profiter pour découvrir un nouveau pays, un autre empire et surtout un endroit où les vampires vivaient tranquillement contrairement aux autres endroits. Bon évidement, ce ne fut pas la seule raison de sa venue ici. On s'en doute bien, elle surveillait Richard. Le fait qu'il veuille retrouver cette vampire avait comme éveillé un étrange sentiment au fond de Capucine. Un sentiment qui était un mélange de peur et de jalousie. Elle se souvenait très bien de ce qu'elle avait fait de l'homme sur qui Capucine avait jeté son dévolu il y a une dizaine d'année. Et elle avait juste peur qu'elle refasse la même chose. Possessive et Jalouse ? Oui, c'était un peu Capucine.

On ne sait quel vent l'a poussé à agir ainsi. Mais au lieu de prendre du bon de temps et de visiter le pays, elle avait décidé d'aider Richard, ou du moins, de partir à la recherche d'Aliénor. Elle n'éprouvait aucune sympathie pour elle mais elle se disait que plus vite ils l'auraient retrouvés, plus vite ils pourraient profiter, pleinement, du pays.

Grâce à des informations, à du flair et diverses autres choses, Capucine arriva à trouver la demeure d'Aliénor. Elle comptait s'y rendre afin d'en savoir plus sur elle mais aussi pour vérifier si elle n'était tout simplement chez elle. Bah quoi, elle aurait pu avoir des envies de solitude totale et se retrouver seule, se coupant du monde et ne donnant signe de vie à personne. C'était une hypothèse pour la jeune femme et il fallait soit la confirmer soit la réfuter.

A première vue, il ne semblait y avoir personne. Mais elle restait sur ces gardes et restait silencieuse. Et elle avait bien fait puisqu'elle entendit du bruit dans la pièce à côté. C'est dans ces moments là où Capucine regrettait la magie puisque là, elle n'avait rien pour se ''protéger''. Enfin bon, il fallait bien y aller. La blondinette s'avança. La porte menant à la pièce était entre ouverte. Avant de débarquer, elle regarda la personne, dans l'ouverture. Oui, avant d'attaquer, il fallait qu'elle voit à qui elle avait à faire...pour ne pas se retrouver ''K-O'' directement. Apparemment, c'était un simple sorcier, qui fouillait la maison. Était-il là pour l'argent si Aliénor était retrouvée ? Certainement. Enfin bon, c'est pas tout ça mais il fallait en savoir plus.

Tout se passa vite mais pour résumer Capucine avait sauté sur le jeune homme qui se trouvait dans la pièce. Elle lui fit un clef de bras alors qu'il était allongé au sol. Elle prit soin de prendre sa baguette et l'envoyer un peu plus loin.

Capucine – « T'es qui toi ?! »

Il ne semblait pas vouloir répondre. Capucine regarda autour d'elle, tout en maintenant la pression. D'ailleurs, le jeune homme avait l'air d'avoir mal puisqu'il serrait des dents. Capucine lâcha le bras du jeune homme et se releva. Elle attendit qu'il se relève pour le pousser violemment contre un mur. Il tomba dans les pommes. Ceci laissa le temps à Capucine de prendre une corde qui se trouvait pas loin de la cheminé. La corde à la main, elle revint rapidement vers le jeune homme, qui en le regardant bien n'était pas mal. Cela donnait envie de jouer un peu avec lui. On ne sait pour quelle raison, Capucine lui retira (avec du mal) son tee-shirt, laissant apparaître un beau torse. Puis ce n'était qu'après qu'elle l'attacha.

A croire que ce qu'elle l'avait tué ! Il ne se réveillait pas. Mais heureusement, elle avait une bonne technique pour le réveiller. Se levant de la chaise où elle s'était posée en attendant qu'il reprenne connaissance, elle alla vers son ami du jour, vers la nuque plus précisément. Elle sorti ces crocs et le mordit bien comme il faut. Ceci le réveilla puisque le jeune homme ne pu s'empêcher de crier. Malheureusement pour lui, il ne pouvait rien faire puisqu'il était comme ligoté.