La réputation sulfureuse [Private Aurianne Nott]

L’ allée des Embrumes, qu’ est ce que je foutais là ? J’ avais beau la connaître par cœur, y ayant souvent accompagné Père de son vivant, elle me répugnait toujours autant et sûrement même davantage aujourd’ hui, alors que mon ambition de toujours de servir le Maître m’ avait désertée. Mes yeux n’ avaient jamais tant vu la saleté du lieu que maintenant, et tout me semblait plus crasseux que dans mon souvenir. J’ aurais volontiers fui l’ endroit, mais je ne pouvais pas, devant absolument parler avec la personne qui avait eu l’ idée quelque peu glauque, mais non moins normale dans l’ esprit d’ une Mangemorte, de fixer notre rendez vous ici ; aussi je me contentais d’ accélérer le pas, baissant les yeux pour ne pas croiser un regard qu’ il vaudrait mieux éviter.

Elle avait intérêt à être à l’ heure ; Lukas ignorait l’ endroit où je me trouvais et je ne pouvais m’ attarder trop longtemps. Je n’ étais pas sortie de chez les Krüger depuis ma dispute avec Théodore et ma fausse couche, hormis pour faire quelques promenades en compagnie de Charlie, et Lukas ne manquerait sûrement pas de s’ inquiéter s’ il remarquait mon absence. Il avait été comme un Père pour moi, qui n’ avais jamais eu la chance de connaître ce sentiment, le mien ne l’ étant que par son nom, et en cette période je ne sais pas ce que je serais devenue sans lui, et le soutien qu’ il m’ apportait à chaque seconde. Lors de cette maudite nuit j’ avais tout perdu, mon mari, les enfants, ouvrant ainsi une plaie incapable de cicatriser dans un cœur que j’ avais si souvent cru de pierre. Depuis les jours s’ écoulaient, tous mornes et sans aucun intérêt, plus rien ne me poussait à vouloir voir encore un jour de plus le soleil se lever, et pourtant j’ étais toujours là, souffrant un peu en silence, beaucoup en pleurant dans les bras de Lukas. Et tout cela à cause de la Magie Noire. Depuis ma naissance, j’ avais été destinée à rejoindre les rangs du Maître, Père ne m’ élevait que dans ce but, et il se fichait bien de moi tant que je le rendais fier. J’ y étais très bien parvenue jusqu’ alors, devenant presque un sosie de lui, une sorte de modèle réduit, me dégoûtant de moi-même. Et puis il était mort. On aurait alors pu penser que j’ étais libre, mais la vérité était toute autre, beaucoup moins utopique et beaucoup plus cruelle. La vérité, c’ était qu’ il ne me restait que cela et que je devais m’ y accrocher avec toute la force du désespoir dont j’ étais capable. Aujourd’ hui tout cela avait changé et il m’ avait fallu un drame pour comprendre que ma vie ne se résumait pas à la magie noire, et que jamais il n’ en serait le cas. Je ne serai pas Mangemorte, cette perspective s’ était imposée devant moi, si alléchante que je ne pouvais passer à côté, quitte à y jouer ma vie, puisque je n’ ignorais pas les traitements que le Seigneur des Ténèbres se délectait de donner ou faire donner aux traîtres.

J’ accélérais le pas, plus par nervosité que par réel besoin de me presser, ne pouvant m’ empêcher de jeter de temps en temps quelques regards autour de moi, terrifiée à l’ idée d’ être suivie. Je m’ arrêtai finalement près du magasin de Barjow & Beurk, que j’ avais si souvent visité par le passé et dont je me demandais maintenant comment des êtres humains pouvaient être dérangés au point de convoiter un objet provenant de cette boutique. Personne n’ était là, mais je ne m’ étonnais pas. Je m’ étais attendue à arriver en avance puisque j’ avais pris moins de temps que d’ ordinaire pour faire le chemin.

J’ attendais plantée là depuis quelques minutes déjà, jouant avec mes cheveux dans un tic nerveux, lorsque j’ entendis la porte de la boutique se claquer. Machinalement je relevai les yeux, le regrettant aussi tôt. Jr ne pouvais que connaître la personne qui se tenait à quelques mètres de là, même si ses cheveux sombres cachait en partie son visage sur lequel je parvenais quand même à apercevoir un air de démence comme à chaque fois qu’ elle s’ apprête à jouer avec une proie : Bellatrix Lestrange. Je ne pensais même pas à avoir peur, mon cerveau s’ étant paralysé à sa simple vue et m’ empêchant le moindre mouvement, seul mon regard demeurait fixé sur elle, spectateur impuissant du spectacle qu’ elle déciderait de donner.

Bellatrix & Aurianne & Tanya ♥

Je traînais dans le Chemin de Traverse, tranquillement. Certes, ce n'était pas un endroit sûr mais ce n'était pas pire que Poudlard finalement s'il l'on savait se faire discret. Je portais ma cape de sorcière noire, comme celle de n'importe quel sorcier, impossible de me reconnaitre. Mais de toute façon qui pourrait vraiment me reconnaitre ?

J'avançais alors dans la rue sombre, capuche sur la tête. Plus aucuns magasins n'étaient accueillants car plus aucuns magasins n'existaient vraiment. Je me demandais quel avenir avait Poudlard sans magasins de magie, sans professeurs compétents, sans ambiance, sans vie ... Les sorciers continueraient-ils à aller à Poudlard ? Si cela continue l'année prochaine, il n'y aura déja plus d'enfants nés moldus, il n'y aura plus que très peu de bonnes familles qui souhaiteront continuer à mettre leurs enfants la-bas. On va t'on ? On va le monde de la magie ?
Plus aucuns endroits n'étaient sécurisé, le ciel ne cessait d'être sombre, les visages étaient aigris, tout laisser à croire que le Seigneur des Tenèbres commençait à prendre pouvoir. Tous les espoirs étaient fondés sur l'Ordre du Phénix et sur Harry Potter, l'Elu dont nous n'avions plus de nouvelles, mais nous étions tous surs qu'il souhaitait en finir avec Celui dont on ne doit pas prononcer le nom. Qui allait sauver le monde de la magie ? Qui n'allait pas le faire, ou bien encore, qui ne souhaitait pas le faire ? C'étaient les principales questions qui se posaient dans les dortoirs, discrétement, de peur d'être entendu, maintenant que nous avions la plupart des professeurs et un directeur mangemort.

La rue était très longue, c'était un peu comme la rue principale d'une grande ville. Avant tout était là, chaque sorcier avait eu un excellent souvenir de cette rue, symbole de notre entrée à Poudlard, de notre première baguette, premier chaudron, première chouette parfois, premiers bouquins de magies et premiers pas dans le monde de la magie pour certains, pour les nés-modlus, comme moi. J'aimais réellement cette rue, mais le probléme c'est que j'aimais, le probléme est que je passe mon temps à parler au passé.

Tout en avançant je vis une silhouette au loin, un silhouette qui me paraissait familière, mais je n'en étais pas vraiment sure. Je décidai de la suivre, pour m'en assurer, à présent personne n'est trop prudent. La silhouette se dirigeait vers l'Allée des Embrumes, plus précisement, à coté de chez Barjow et Beurk. Je m’arrêtai. Ce n'était pas bon, c'était certainement un mangemort, rien de bon pour une élève de Gryffondor nés moldus comme moi. Pourtant, la silhouette me rappelait vraiment une personne avec qui je reste tous les jours, bien que ne l'aime pas vraiment, une personne avec qui je reste uniquement par obligation. Mais je suis si curieuse, et je n'ai pas vraiment peur, quoique ... J'aimais l'adrenaline, j'avais tous le temps le gout du risque depuis un certain moment. Alors, je continuais ma marche, et la personne que je pensais avoir vu était la bonne. A deux mètres de moi ; Aurianne Nott, fiancée de Théodore Nott. On se connaissait bien, même si je savais ce qu'elle pensait de moi, et qui d'ailleurs n'avait rien de plus gentil que ce que pensait d'elle. Mais, il était toujours marrant de rester avec elle, elle me faisait découvrir continuellement de nouvelles choses, bien que, depuis un moment, elle avait changé sans que je sache réellement pourquoi. Elle était la, devant la boutique, immobile.

Je m'avançai à grand pas vers elle en lui lançant :

Tanya ♣ Hey ! Aurianne, qu'est ce que ...

Impossible de continuer ma phrase. J'avais l'impression que mon coeur avant fait deux tours à la fois. Mon souffle était comme coupé. Se tenait devant moi, Bellatrix Lestange, mangemorte assez connue pour ses nombreux crimes tels que celui de Sirius Black, oncle d'Harry Potter et dernier membre de sa famille à l'époque. Elle avait fait souffrir tant de personnes et elle continuait encore. J'avais donc peur de ce qu'il allait m'arriver, là, maintenant, tout de suite ... Le danger à deux mètres de moi, en face de moi ... Mais de toutes façons qu'ai-je à perdre réellement ? Je n'avais plus vraiment de vie, j'étais avec des personnes qui ne m'appréciaient pas, avec mes notes et mon manque d'envie, je n'avais pas d'avenir, j'aimais mes parents mais ils ne me comprenaient pas, surement aussi parce qu'ils n'essayaient pas. Je n'étais pas heureuse, j'avais l'impression que rien ne rendrait ce que j'avais perdu. Alors, je n'étais rien au fond, à quoi bon rester ? Il y a beaucoup plus de raisons qui me poussent à partir plus qu'à rester. Si je meurs, ne serait ce pas mieux ainsi pour moi ? Être libre et en paix, n'était ce pas ce que je voulais ? Mais, si je dois mourir aujourd'hui, là, ce soir, la suite, ce n'est pas moi qui la décide ...

Sur ce visage qui transpirerait la crasse de l’impureté doublé du voile de la traitrise, un éclair passa. Nul besoin de déployer de moyen spectaculaire auprès de ces grues à la jolie tête, les traits de Bellatrix mille fois photocopiés et accroché au coin des rues étaient reconnaissables. Le hasard fait bien les choses. Le prédateur piqué par la faim est sorti du terrier et la proie fraîche et facile s’est présenté sous ses narines frémissantes. Les métaphores n’auraient pas manqué pour décrire la cruauté de ce fatidique instant. Elle s’attendait à ce qu’un cri ou une tentative de fuite suive la surprise de Nott. Nul son ne s’échappa des lèvres roses et soudées. Il y avait encore un bon trafic dans l’allée des embrumes mais en trois pas elle fut assez près pour lui bloquer toute échappatoire. Une démangeaison tremblante s’empara des coins de sa bouche à l’idée du spectacle qui allait suivre. Pourtant célèbre dans l’art de sortir des phrases assassines, Bellatrix Lestrange respecta le silence établie entre elles deux. Le bruit de la ville se faisait plus sourd lui sembla-t-il. Sans rabattre son capuchon, elle écarta ses bras et sa baguette sortit d’une manche. Juste derrière Nott commençait un dédalle de petite rue. Plus on s’éloignait du chemin de traverse, plus les routes se désertifiaient. La pointe de sa baguette alla se loger sous le cou blanc de la sombre adolescente. Elle était plus jeune que Bellatrix ne l’avait imaginé. Un amuse-gueule.

-Alors Aurianne chérie, l’Ordre du Phoenix t’as arraché la langue ?

Sans se demander si l’allusion était dans le contexte, elle décida que Nott paierait en plus aujourd’hui pour les langues fourchues qui informent les résistants de l’Ordre. Elle passa sa main sur sa joue et la griffa avec ses ongles jaunes. Puis, ses doigts saisirent son menton avec force et elle la contraint à tourner la tête pour mieux observer son profil. Dans ses pommettes et dans ses yeux, son esprit courbaturé depuis Azkaban cherchait à se rappeler du grand-père De Bray. Sans succès, aucun membre connu de la famille ne se rappelait à ses souvenirs. Qu’importe, s’il y avait erreur sur la personne, si celle-là ne s’appelait pas Aurianne mais Marjorie ou Lison, tant pis.
Au bout de quelques longues secondes, elle relâcha son étau avec brutalité pour l’agripper aux cheveux et la pousser vers un endroit moins fréquenté où nul ne l’entendrait s’égosiller. Avant de disparaître, Bellatrix fit traîner un regard circulaire. Son visage était terriblement sérieux. Les gens passaient sans les voir. Seule une gamine restait plantée à quelques mètres, tellement subjuguée par la discrète scène que ses yeux auraient dut tomber de leur orbite et rouler par terre. Dans un réflexe typiquement mangemort, elle foudroya des prunelles le blason rouge et or cousu sur sa robe. Trop occupée à la dévisager, elle était pétrifiée, la pauvre larve inconsciente. Probablement lisait-elle souvent les journaux car Bellatrix aurait mis sa baguette au feu qu’elle avait été reconnue. Tuer un témoin de ce genre pour se mettre dans l’ambiance était appétissant mais ici trop voyant. Une pauvre gamine comme elle, de cet âge et de cette maison finirait de toute façon pas trouver les ennuis avant de sortir de l’allée des Embrumes. Qu’un vieux sorcier décrépi l’entraîne dans un coin sombre ou bien qu’elle finisse piétinée par des gnomes, il lui arriverait forcément malheur. Tuer Aurianne Nott n’était déjà pas bien brillant.

Sans ajouter mot, elle disparu au coin d’une rue en maintenant fermement sa victime et transplana quelques allées plus loin. Des habitations closes, pas un chat, le décor idéal. En jetant violemment son paquet de viande contre le sol, elle s’épousseta et prépara ses sorts.