Rolling in the deep [Fe]

« SAVE THE QUEENS ! »

Les soirées classes, les soirées huppées, les soirées habillées, les soirées in, les soirées bourges, les soirées sophistiquées, les soirées classées privées... les soirées emmerdantes à mourir. Lorsque j'avais accepté de venir, c'était sans me souvenir à quel point ce type d'endroits peut se montrer désagréable à fréquenter. Dans ma jeunesse, j'avais déjà eu à faire à des galas avec comité d'honneur, seulement je n'étais pas assez âgée pour réaliser que ce n'était qu'un tas de discussions trop... professionnelles. J'étais trop branchée sur les jolies robes, dire que maintenant je donnerais n'importe quoi pour me retrouver à une fête du vendredi décadente plutôt que dans un endroit si glauque et déprimant. Je ne pouvais pourtant pas m'éclipser, aussi forte en soit l'envie... Quelques jours plus tôt, l'Ordre avait annoncé qu'une grande "entrevue" entre sorciers de toute l'Angleterre aurait lieu, dans une sorte de manoir, propriété d'un riche entrepreneur dans le domaine du Quidditch. Comme c'était banal ! Pour quelles raisons un tel regroupement ? Rien de bien intéressant. Pour le bien des créatures magiques et leur intégration dans la société. Laissez moi rire ! Comme si toutes ces grandes dames habillées en Prada et portant du Chanel, ces messieurs du haut Ministère ou des grandes familles, avaient la moindre envie de voir un centaure débarqué à leur réception. Rien que l'idée me fit rire légèrement, m'attirant le regard suspect d'une femme vêtue de noire et aux airs hautains. Quoi ? Tu veux ma photo ?

Cette atmosphère trop... calme, sérieuse, me donnait la nausée. Je n'avais pas ma place parmi ce haut monde. C'était de la pure "infiltration", en cas de débordement. Bien entendu, je me fondais à toute cette foule aux noms composés et aux tons très... très... exagérés. A vrai dire, j'étais bien issue d'une famille riche, bien qu'en étant la dernière représentante. Je me faisais une place dans la masse. Je saluais poliment, hochais la tête et riait niaisement quand un vieux pervers venait me parler de ses projets d'entreprises, comme si je m'y intéressais. Puis une fois écartée, je grimaçais, soupirais et me jetais sur les coupes de champagne traînant un peu partout. Au bout d'une demi-heure, j'avais arrêté de compter le nombres de verres qui avaient pu y passer. Je savais seulement que j'étais là, accrochée au nœud papillon d'un serveur mal à l'aise en lui souriant comme pour lui donner confiance. « Honey, t'as pas toute la vie devant toi tu sais... C'est ce qu'on dit, mais ça passe bien plus vite que ça... Tu comptes pas te faire reluquer par ces vieilles pies jusqu'à ta majorité, rassure moi ? » J'en rajoutais, je mettrais tout sur le compte de l'alcool si jamais on me questionnait le lendemain. En réalité, j'étais parfaitement consciente de ce que je faisais, de ce que je disais. Le retenant par par le col de sa chemise, cachés derrière un morceau du mur du salon, pas le moins du monde inquiétée par la présence proche d'autres invités, je ressentais sa panique, son stress. Il tenait le plateau vide d'une main crispé, tendu. Sa réaction face à mes avances me faisait rire... Pourtant, il ne m'attirait pas, j'avais jeté mon dévolu sur le plus mignon - les boucles, c'était à la mode. Il était adorable, certes, mais il ne dégageait rien... de spécial. C'était sans doute un étudiant de Poudlard en vacances... J'avais l'étrange impression d'être de plus en plus exigeante avec ces gamins, ou alors j'étais en pleine période de changement. Je voulais... Je voulais quelque chose d'autres. Les puceaux coincés dans un travail au noir, ce n'était plus pour moi.

Finalement, je le lâchais, le laissant retourner à son devoir après lui avoir voler un baiser. C'était la moindre des choses, si je ne trouvais pas mieux avant la fin de la nuit, je savais au moins à qui aller m'adresser. Je l'abandonnais, plissant ma robe de couleur sombre, à dos nus et m'arrivant aux genoux. Je profitais également d'être seule pour remettre en place une mèche de cheveux derrière mon oreille, blonds et ondulés (nouvelle coupe, nouvelle couleur) avant de nettoyer cette trace de rouge à lèvre laisser par le passage du jeune innocent, une expression satisfaite se peignant sur mon visage. Je me dirigeais de nouveau vers le buffet, évitant viande, crudités et autre victuailles pour me contenter d'aller me chercher un verre. Boissons moldues et sorcières mélangées sur une même table, c'était risqué. A mes yeux. Peut-être cette mondanité de l'ancien temps ne se rendait-elle pas compte de ce qui pouvait se découler d'une consommation trop importante... Ils ne vivaient plus, les pauvres. Ils étaient condamnés à discuter boulot jusqu'au cercueil, en passant par les problèmes de leurs progénitures et les infidélités du mari d'à côté. La seule chose intéressante, c'était ça, les ragots, puis le serveur en divertissement. Il ne pouvait plus s'empêcher de me regarder... Un sentiment de fierté, liée à cette soudaine attention qu'il me portait, commença à naître. Mais rien que ça, de la fierté.

Je vidais d'un trait le fond de whisky que je m'étais servie avant d'opter pour le retour au vin. J'étais optimiste quant au mélange des genres ! Il faut savoir varier ! Je connaissais mes limites, je savais où m'arrêter avant de m'écrouler en me ridiculisant. J'étais toujours classe, même avec un coup dans le nez. « Quitte à devoir tout tenter après tout... » J'avais murmuré cette phrase pour moi-même, relevant les yeux et captant seulement à cet instant qu'une rousse inconnue était debout, là, non loin. Elle me rappelait vaguement quelqu'un, sans doute à cause de Poudlard ou de l'Ordre... Peu importe... J'étais juste en plein blocage sur sa coiffure, il faut dire qu'il y a peu j'étais rousse moi aussi, normal que je sois nostalgique d'un coup ! « Cette couleur vous va super bien ! » Un peu trop... comment dire, engagée ? Brusque ? Émue ? Ouais, j'étais dans ma lancée, quoi.

Noami entra dans le bâtiment, la porte ouverte par un groom qui lui lança un petit sourire timide avant de prendre sa veste et de la mettre dans un placard avec toutes les autres. Un placard plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur visiblement. La jeune femme s’aventura dans la grande pièce où était donnée la réception, scrutant en long en large et en travers qui se trouvait là. Apparemment, elle allait avoir droit à une longue soirée d’ennui. Elle ne voyait que politiciens, journalistes et autres magnas de la haute société, accompagnés la plupart du temps par leurs compagnes ou compagnons, surtout là pour faire jolie. Un jeune serveur vint à sa rencontre pour lui proposer un verre de champagne. Elle en prit deux. Bah oui, mieux valait être paré. Elle se mêla à la foule, ne parlant à personne, et cherchant à éviter le moindre contact avec certains hommes qui semblaient plus que douteux. La plupart étaient là pour draguer, mais elle n’était pas du tout intéressée. Elle se trouva alors un bon petit coin à l’écart, attendant patiemment qu’elle puisse s’évader de cet endroit maudit. Sa robe verte émeraude mettait en valeur ses yeux et sa chevelure de feu. Elle attirait pas mal de regards, mais n’y prêtait pas vraiment attention. Apparemment, sa tenue faisait de l’effet. Mais attirait surtout l’œil des hommes qui avaient au moins le double ou le triple de son âge, et il y en avait beaucoup à cette soirée…

Pourquoi elle était là déjà ? Ah oui l’Ordre et ses missions stupides. Et elle n’avait même pas eu le choix. De toute façon c’est pas comme si elle avait quelque chose à faire de ses journées et soirées. Sa vie sentimentale ? Un vrai désert. Elle avait revu son ex Michael quelques semaines auparavant, puis depuis rien. Elle ne prenait même plus de plaisir à draguer les beaux mecs. Peut-être que c’était un signe qu’elle devait se caser. Ou devenir nonne. Ou changer de camp. Hein quoi ? Elle n’avait pas pensé à ça sérieusement ? Bon ok, elle avait embrassé une de ses amies à Poudlard quand elle était élève, mais c’était une expérience, rien de plus. Mais de là à vraiment envisager d’avoir une relation avec une femme...Oh et puis zut hein, elle s’ennuyait tellement à cette soirée, elle pouvait bien s’amuser un peu.

- Cette couleur vous va super bien !

Quand on parle du loup (enfin de la louve). Elle tourna la tête pour voir qui s’était adressé à elle, et vit alors qu’une autre femme se tenait à coté d’elle. Rousse elle aussi, et particulièrement séduisante dans sa robe noire, elle semblait être assez…rentre dedans. Et surtout, Noami aurait juré l’avoir déjà vu quelque part. Elle faisait surement parti de l’Ordre non ?

- Merci, je dois dire que votre robe vous mets très bien en valeur ! lui répondit-elle en souriant.

Hein quoi ? Elle n’avait quand même pas sérieusement flirté avec elle ? Ca lui rappelait ce qu’elle avait eu dans la tête quelques minutes plus tôt. L’alcool lui montait surement à la tête, mais en même temps, elle trouvait ça très divertissant. Et si elle se mettait vraiment à flirter avec cette fille ? Et si elle répondait à ses avances ? Cela pourrait devenir très intéressant.

- Moi c’est Noami, lui dit-elle. Ca m’étonne que quelqu’un comme vous ne soit pas accompagné.

Si elle continuait comme ça, elle risquait de la faire fuir. Bon allez, elle se reprit une bonne gorgée de champagne pour avoir du courage. Après tout, la soirée ne pouvait pas être pire. En plus, elle trouvait son « amie » plutôt séduisante et envoutante. Elle avait un petit quelque chose en plus, enfin bref…elle n’allait pas la demander en mariage mais elle comprenait qu’une femme comme ça puisse attirer les regards.

Je n'allais pas non plus refuser les compliments gratuits, c'était comme un échange de flatteries. Il faut avouer que malgré sa bonne compagnie, le jeune serveur ne s'était pas montré le plus galant du monde. Il savait simplement me dévisager comme il se doit, les mots, ce n'étaient pas son domaine. Non c'est vrai, parfais les gestes en disent tellement plus ! Cependant, je reste humaine - quoi qu'on puisse raconter à mon sujet - et j'aime bien qu'on me traite à ma juste valeur de temps à autre, je ne vais pas le nier. « Moi c’est Noami. Ca m’étonne que quelqu’un comme vous ne soit pas accompagné. » Rien qu'à ces mots, je manquais de m'étouffer avec mon vin. Non pas que son prénom était horrible et que je la plaignais de devoir le supporter depuis sa naissance... Au contraire, je trouvais qu'il sonnait plutôt bien à l'oreille, facile à prononcer et aux consonances agréables. Là n'était pas le sujet.

M'imaginer accompagnée par quiconque ça me... ça me faisait bizarre. J'étais membre du groupe "seules envers et contre tous" depuis tellement longtemps que ce n'était pas une hypothèse que je pouvais imaginer. C'est vrai, moi, au bras de George Clooney, en train de me la péter parmi le voisinage, ce n'était pas déplaisant comme vision, mais beaucoup trop irréaliste. Je préférais encore Johnny Depp ou Babar. Un éléphant c'était original non ? Autant me ramener avec un asiatique. Les asiatiques font toujours fureur dans les fêtes de ce genre, on leur pose des tonnes de questions sur les chiens et les sushis. Très intéressants comme sujets, ceci dit. « Ivy. J'étais supposée venir avec quelqu'un mais il m'a planté... Il est juif, il a sans doute d'autres obligations. » Qu'est-ce que je venais de sortir comme conneries là ? Ce n'est pas parce qu'on remet toujours tous sur la tête de ces pauvres juifs que je suis sensée faire pareil. Même si pour le coup ça m'évitait de passer pour une ratée obligée d'essayer de se taper les employés pour se sentir moins à l'écart.

Je préférais me servir un autre verre plutôt que de devoir me justifier sur cette explication minable et faussée de ma solitude actuelle. Je me retournais alors face à la fameuse Noami et ne pouvait m'empêcher d'admirer sa tenue qui lui allait, autant le dire, aussi bien que sa coiffure. Je portais alors la coupe remplie à mes lèvres, observant les couples de vieux entrepreneurs accrochés à leurs cupides de femmes mais dont les yeux fixaient leurs secrétaires également conviées. C'était d'un comique, c'est histoire de couple à la mode "Feux de l'Amour". Finalement, "mieux vaut être seule que mal accompagnée". « Je pourrais vous retourner la remarque en tout cas... » Je lui offrais un sourire tout ce qu'il y a de plus innocent en croisant les bras contre ma poitrine, faisant attention à ne pas renverser le contenu de mon verre sur ma robe. « Je me demande ce que toutes ces femmes bombées au silicone peuvent trouver à tous ces... machins, à part la carte bancaire. Les pauvres, je préfère même pas imaginer comment étaient leurs nuits de noces... » Rien que d'y penser, ça me donnait mal au ventre.

Secouant la tête pour me sortir cette vision d'horreur, je ne cachais pas ma joie retrouvée d'avoir trouvé quelqu'un semblant "normal" avec qui discuter. Ca se devinait qu'elle ne faisait pas partie intégrante de ce club où règnent snobisme et égocentrisme. Je n'en pouvais plus d'entendre la femme d'un grand vendeur de balai parler de son nouveau nez, de cet homme propriétaire du studio où enregistraient les grands groupes sorciers se vantant des mérites de son peintre personnel, et encore moins de cet... ce semblant d'elfe miniature empaillé trônant près d'une cheminée. « Ce serait indiscret de vous demandez ce qui vous amène ici ? Vous ne semblez pas être du genre à fréquenter habituellement ce type d'endroits, sans vouloir vous vexer. Ce serait même plutôt un compliment. » Il n'y avait pas de quoi se vanter d'être adepte des petits fours pafaits de Madame Je Trompe Mon Vieux Connard De Mari Avec Le Jardinier Que Ma Fille Se Tape Aussi.